Le 3 janvier 2017 est pour moi une date inoubliable. Il s'agit d'une date qui me rappelle la gloire de Dieu, même lorsque tout semble anéanti. Alors que le 31 décembre 2017, je m'étais fait refuser à la dernière minute un plateau télévisé, à quelques heures de celui-ci, pour parler de mon premier livre À l'Encre de la Passion. Le Seigneur ne s'est pas tu face aux cris de mon coeur, et a permis dans sa grâce que le 3 janvier, de manière inopinée, je puisse être reçue sur un autre plateau télévisé. C'était le plateau de l'émission C'midi, une émission suivie par les jeunes un peu partout en Afrique francophone et dans la diaspora. Le comble a été que l'animatrice n'a pas simplement parlé de mon livre, mais de mon parcours également. Au-delà de mes espérances et de mes rêves! Cette émission a été pour moi un signe de Résurrection dans les larmes qui avaient été miennes trois jours plus tôt. Ceci dit, ce plateau a été également annonciateur d'une autre gloire que j'allais expérimenter au cours de l'année 2017 et jusqu'à ce jour, mais de manière assez paradoxale.
Au cours de l'émission, l'un des animateurs, docteur Philo m'a adressée les propos suivants:
« Est-ce que vous pensez à votre chute? Est-ce que vous ne vous dites pas quelque part que c'est une bombe à retardement? Il [Dieu] vous a monté et puis un jour gbou [onomatopée pour symboliser un écrasement] ... Est-ce que vous ne pensez pas à ça? Je me mets dans la peau de l'homme de la rue, du pessimiste, qui se dit ah la manière dont Dieu a fait monter la fille-là, est-ce qu'il ne va pas la faire descendre ? Est-ce que vous préparez votre chute? »
Quelle question...et aujourd'hui avec du recul j'ai envie de dire quelle merveilleuse question! J'y avais répondu tant bien que mal, en toute sincérité. Ceci dit, bien que j'aie été sincère, avec du recul, je réalise que ma réponse était empreinte d'une conception erronée de la chute que j'avais. Cette conception erronée traduisait d'ailleurs l'une de mes plus grandes peurs...la peur de l'échec! Sa question était ainsi prophétique car j'allais apprendre cette année 2017, à faire face à cette grande peur que j'avais, à cette chute dont il parlait, qui paradoxalement allait me faire vivre une communion inouïe avec le Seigneur.
En 2017, j'ai eu à faire face frontalement à l'échec lorsque je n'ai pu être admise à un programme de doctorat que je voulais car mon directeur ne pouvait plus prendre d'étudiants en supervision. Quel brisement ça a été! Je me sentais tomber "gbou" comme Dr Philo le disait si bien. Mais en même temps, dans cette douleur qui venait remettre en question mon identité (car oui je m'étais malheureusement identifiée à ce que je faisais), le Seigneur m'a consolée, il n'a cessé de me dire que tout ceci me menait à sa perfection. Cette consolation reçue de Dieu a été un véritable oasis et elle a mise en déroute l'insinuation (je crois inconsciente) de Dr Philo me disant que Dieu me laisserait tomber en me faisant tomber. Dans cette consolation, cette pensée a été brisée car Dieu s'est révélé être un Papa qui, si chute il y a, va tomber Lui-même plus bas que nous afin de nous porter quand nous tombons. Il ne médite pas notre mal, mais Il a une grande humilité liée à son immense amour pour nous, qui le fait aller plus bas que nous, afin de ne pas avoir peur dans ces moments. Dans sa consolation divine, il est vrai que j'ai eu du mal à comprendre la perfection dont il parlait. Mais j'ai fini par le réaliser au gré des jours et des mois, que cette perfection était de vivre dans une confiance totale en son amour. Ce brisement a été de bonne augure bien que douloureux, car il a brisé mon ego, il a brisé les mensonges que j'avais sur mon identité, il a brisé ma conception de l'échec, de la chute.
Et cela pousse à vous demander: pour vous, qu'est-ce que l'échec ?
Bien souvent et comme dans le Larousse, nous définissons comme échec, tout ce que nous n'obtenons pas, et dans la même veine, tout ce qui ne se passe pas selon notre entendement. Le succès devient ainsi d'avoir tout ce que l'on veut et d'avoir tout qui se plie à notre volonté. Sauf que ces définitions du succès et de l'échec sont un « peu beaucoup » erronées🙅🏾♀️. Derrière ces définitions, nous avons implicitement l'apologie d'une vie qui s'épanouirait sans accueil de la limite, une vie dans laquelle tout est perçu comme un dû et non comme un don. L'apologie d'une vie où l'on ne veut entendre que des « oui » et « amen » signifiant que notre volonté soit faite. N'est-ce pas l'apologie de l'enfant-roi (ou de l'enfant gâté)? Bref, cette apologie est mensongère car la loi du bonheur, le chemin de la béatitude que Dieu nous donne depuis la genèse jusqu'aux béatitudes (Matthieu 5) est que nous sommes épanouis, nous devenons pleinement nous, donc des "successful human being", lorsque nous consentons à la limite, et que dans cette limite nous nous recevons de Dieu, qui nous y donne toujours sa grâce. Dans ce qui semble aux yeux du monde un échec, il y a plutôt une limite qui cache une grâce pour nos vies. Dans le cas de la limite que j'ai expérimentée, elle cachait la grâce de la découverte de mon identité véritable et des désirs que Dieu a inscrit dans mon cœur, la grâce d'une communion transfigurante et vivifiante dans le Christ, la grâce de la confiance en Dieu, la grâce de la maturité, et je clôturerais pour ne citer que ceux-ci, la grâce d'un programme doctorale bien meilleur, qui épouse les désirs les plus fous et profonds que Dieu a inscrits dans mon cœur. La limite a permis que je n'obtienne pas une chose (qui d'ailleurs n'aurait pas contribué à mon épanouissement), mais elle a été un gain infiniment plus grand. Avec Dieu, les mathématiques défient notre logique car pour être multipliés (épanouis), ils nous faut accepter d'être rompus...comme le Christ! Lorsqu'on est rompu pour être multiplié, l'on devient une action de grâce vivante, en d'autres mots, une eucharistie vivante comme le Christ!
Ainsi, je ne sais pas si vous aussi vous avez déjà eu la question de Dr Philo, ou si vous vous la posez intérieurement de manière frénétique, mais j'aimerais vous encourager à ne pas avoir peur de l'échec tel que le monde le présente. Je vous encourage à ne pas avoir peur d'être rompus. Vous ne serez pas rompus seuls, vous le vivrez avec le Seigneur. Et, comme à sa sainte Passion, il vous rendra féconds! Il en fera un gain infiniment plus grand!
Sans être dans le dolorisme, n'ayez pas peur!
Signé JM!